La règle des 500 parrainages

Conseil Constitutionnel : Le droit à présenter

Extrait du site : https://​www​.vie​-publique​.fr/​e​c​l​a​i​r​a​g​e​/​2​3​8​7​2​-​p​a​r​r​a​i​n​a​g​e​-​d​e​s​-​c​a​n​d​i​d​a​t​s​-​l​a​-​p​r​e​s​i​d​e​n​t​i​e​l​l​e​-​l​e​s​-​5​0​0​-​s​i​g​n​a​t​u​res

Les condi­tions requises pour être can­di­dat sont fixées par l’article 3 de la loi du 6 novembre 1962 rela­tive à l’élection du pré­sident de la République au suf­frage universel.

Tout citoyen fran­çais âgé de plus de 18 ans (au lieu de 23 ans jusqu’à la loi orga­nique du 14 avril 2011), jouis­sant de ses droits civils et poli­tiques et n’étant dans aucun cas d’incapacité pré­vu par la loi, est éli­gible. Cette condi­tion néces­saire n’est cepen­dant pas suf­fi­sante pour se por­ter can­di­dat à l’élection présidentielle.

Un sys­tème de fil­trage a été ins­tau­ré afin d’éviter des can­di­da­tures trop nom­breuses et d’écarter les can­di­da­tures "fan­tai­sistes" ou "de témoi­gnage" ayant pour seul objec­tif de faire connaître une per­son­na­li­té ou les inté­rêts caté­go­riels qu’elle défend. Ce sys­tème repose sur la néces­si­té d’obtenir le par­rai­nage d’un cer­tain nombre d’élus.

Lors des trois pre­mières élec­tions pré­si­den­tielles au suf­frage uni­ver­sel direct (1965, 1969 et 1974), le par­rai­nage de 100 élus était exi­gé. Cette règle a bien fonc­tion­né pour les élec­tions de 1965 (6 can­di­dats) et de 1969 (7 can­di­dats), moins bien en 1974 (12 candidats).

Une réforme adop­tée en 1976 (loi orga­nique du 18 juin 1976) a por­té ce nombre à 500. Officiellement on ne parle pas de par­rai­nage mais de "pré­sen­ta­tion", les élus pré­sen­tant un can­di­dat à titre indi­vi­duel et de façon auto­nome sans qu’il soit néces­saire que la per­sonne pré­sen­tée ait d’abord mani­fes­té son inten­tion de se por­ter can­di­date. Dans les faits, ce sont les "can­di­dats à la can­di­da­ture" qui sol­li­citent des signatures.

La liste des élus habi­li­tés à pré­sen­ter une can­di­da­ture a été fixée par l'article 3 de la loi orga­nique du 6 novembre 1962, puis com­plé­tée à plu­sieurs reprises au fur et à mesure des évo­lu­tions des struc­tures territoriales.

La liste repré­sen­tait 47 413 élus en 2012. Elle a été actua­li­sée par la loi orga­nique du 25 avril 2016 de moder­ni­sa­tion des règles appli­cables à l’élection pré­si­den­tielle pour tenir compte des der­nières modi­fi­ca­tions appor­tées à l’organisation ter­ri­to­riale (ajout des pré­si­dents de métro­pole par exemple). Sont habi­li­tés à pré­sen­ter un candidat :

  • les dépu­tés, les séna­teurs et les repré­sen­tants fran­çais au Parlement européen ;
  • les maires (maires, maires délé­gués des com­munes délé­guées et des com­munes asso­ciées, maires des arron­dis­se­ments de Paris, de Lyon et de Marseille) ;
  • les pré­si­dents des organes déli­bé­rants des métro­poles, des com­mu­nau­tés urbaines, des com­mu­nau­tés d’agglomération, les pré­si­dents des com­mu­nau­tés de communes ;
  • les conseillers de Paris et de la métro­pole de Lyon ;
  • les conseillers dépar­te­men­taux et régionaux ;
  • les conseillers ter­ri­to­riaux de Saint-​Barthélemy, de Saint-​Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon ;
  • les membres élus des Assemblées de Corse, de Guyane, de Martinique, de la Polynésie fran­çaise, des Assemblées de pro­vince de la Nouvelle-​Calédonie et de l’Assemblée ter­ri­to­riale de Wallis-et-Futuna ;
  • le pré­sident de la Polynésie fran­çaise et le pré­sident du gou­ver­ne­ment de la Nouvelle-Calédonie ;
  • les conseillers à l’Assemblée des Français de l’étranger.

Afin d’éviter les can­di­da­tures liées à la défense d’intérêts pure­ment locaux, la loi du 6 novembre 1962 pré­voit par ailleurs une clause de repré­sen­ta­ti­vi­té natio­nale : les par­rai­nages doivent éma­ner d’élus d’au moins 30 dépar­te­ments ou col­lec­ti­vi­tés d’outre-mer dif­fé­rents, sans dépas­ser un dixième, soit 50 pour un même dépar­te­ment ou une même collectivité.

Chaque élu ne peut par­rai­ner qu’un seul can­di­dat et son choix est irré­vo­cable (si par exemple, le can­di­dat par­rai­né renonce à se pré­sen­ter, l’élu ne peut pas par­rai­ner un autre candidat).

Le rôle du Conseil constitutionnel

Toute la pro­cé­dure de par­rai­nage des can­di­dats est pla­cée sous le contrôle du Conseil constitutionnel.

Le Conseil consti­tu­tion­nel éta­blit tout d’abord le for­mu­laire de "par­rai­nage", qui dès la publi­ca­tion du décret de convo­ca­tion des élec­teurs, est adres­sé par les pré­fec­tures aux élus habi­li­tés à pré­sen­ter un can­di­dat. Depuis la loi du 25 avril 2016, les par­rai­nages ne peuvent plus être dépo­sés phy­si­que­ment au siège du Conseil. Les élus signa­taires doivent désor­mais les envoyer par voie pos­tale au Conseil. Celui-​ci en véri­fie la vali­di­té (iden­ti­té de l’élu, man­dat déte­nu, etc.) et informe chaque can­di­dat du nombre de par­rai­nages valides reçus.

A la fin des opé­ra­tions de contrôle des par­rai­nages, le Conseil consti­tu­tion­nel s’assure du consen­te­ment des can­di­dats ayant fran­chi le seuil des 500 signa­tures et leur demande :

  • une décla­ra­tion de patri­moine qu’il trans­met à la Haute Autorité pour la trans­pa­rence de la vie publique (HATVP). Les décla­ra­tions de l’ensemble des can­di­dats sont publiées sur le site inter­net de la HATVP au moins 15 jours avant le pre­mier tour et sont consul­tables jusqu’à la pro­cla­ma­tion des résul­tats du pre­mier tour. En cas de second tour, seules les décla­ra­tions des deux can­di­dats qua­li­fiés demeurent en ligne jusqu'aux résul­tats défi­ni­tifs (jusqu'à la loi orga­nique du 11 octobre 2013 rela­tive à la trans­pa­rence de la vie publique, seule la décla­ra­tion du can­di­dat élu était ren­due publique à l’issue de l’élection) ;
  • et l’engagement de dépo­ser, en cas d’élection, une nou­velle décla­ra­tion en fin de man­dat. Cette nou­velle décla­ra­tion est publiée au Journal offi­ciel. Depuis 2013, cette décla­ra­tion doit éga­le­ment être trans­mise à la HATVP.

C’est encore le Conseil consti­tu­tion­nel qui éta­blit la liste offi­cielle des can­di­dats à l’élection pré­si­den­tielle, qui est publiée au Journal offi­ciel. L‘ordre des can­di­dats sur la liste résulte d’un tirage au sort.

S’agissant de la publi­ci­té des par­rai­nages, ses règles ont éga­le­ment évo­lué avec la loi du 25 avril 2016. Dorénavant, la publi­ci­té des auteurs de pré­sen­ta­tions est non seule­ment inté­grale à l’issue du recueil des par­rai­nages (contre 500 par­rai­nages tirés au sort par can­di­dat aupa­ra­vant) mais a lieu en conti­nu (au moins deux fois par semaine) au fur et à mesure de la récep­tion des par­rai­nages. La liste actua­li­sée en temps réel des par­rai­nages est publiée sur le site inter­net du Conseil consti­tu­tion­nel le mar­di et le ven­dre­di pen­dant la période de recueil des par­rai­nages. La liste défi­ni­tive des par­rai­nages à la fin de la période de recueil est éga­le­ment publiée huit jours au moins avant le pre­mier tour du scru­tin sur le site du Conseil et au Journal offi­ciel. La publi­ca­tion inté­grale des auteurs de par­rai­nages est une pré­co­ni­sa­tion ancienne du Conseil consti­tu­tion­nel, qui remonte à 1974.

Le Conseil consti­tu­tion­nel a enfin pour rôle de rece­voir les éven­tuelles contes­ta­tions concer­nant la vali­di­té d’une can­di­da­ture. Seules sont rece­vables les contes­ta­tions éma­nant de per­sonnes ayant fait l’objet d’au moins une pré­sen­ta­tion valide.

Un sys­tème sou­vent critiqué

Le sys­tème de par­rai­nage ins­tau­ré pour éta­blir la liste des can­di­dats à l’élection pré­si­den­tielle fait l’objet de débats récur­rents. Lui sont reprochés :

  • son échec à empê­cher la mul­ti­pli­ca­tion des can­di­da­tures, mal­gré la réforme de 1976 (le nombre de can­di­dats s’est éle­vé à 16 en 2002) ;
  • son inca­pa­ci­té à faire une place à des can­di­dats popu­laires mais hors sys­tème ou liés à des for­ma­tions dis­po­sant de peu d’élus ;
  • son carac­tère ana­chro­nique voire archaïque depuis l’instauration de l’élection du pré­sident de la République au suf­frage uni­ver­sel direct ;
  • le risque de voir cer­tains élus mar­chan­der leur sou­tien (mise aux enchères par exemple) ;
  • les pres­sions par­fois fortes exer­cées sur les maires des plus petites com­munes, qui repré­sentent plus de 50% des élus habi­li­tés à par­rai­ner. La trans­mis­sion des par­rai­nages au Conseil consti­tu­tion­nel par les élus eux-​mêmes, pré­vue par la loi du 25 avril 2016, entend évi­ter ces pressions.

Plusieurs réformes du sys­tème ont été pro­po­sées. On peut notam­ment citer :

Toutefois, aucune de ces pro­po­si­tions n’a été jusqu'ici rete­nue. Le par­rai­nage citoyen en par­ti­cu­lier, tel que pro­po­sé par le rap­port de la "Commission Jospin", a recueilli un avis défa­vo­rable des par­tis poli­tiques à la suite de la concer­ta­tion orga­ni­sée par le pré­sident de la République. Lors de ses vœux au Conseil consti­tu­tion­nel en jan­vier 2013, François Hollande a annon­cé y renon­cer en rai­son de la dif­fi­cul­té de sa mise en œuvre.

En conclu­sion, nous sou­hai­tons atti­rer votre atten­tion sur le fait que c'est toute la pro­cé­dure de sélec­tion de can­di­dats qui est à reje­ter, elle est à nos yeux anti­cons­ti­tu­tion­nelle et elle est appli­quée par un Conseil Constitutionnel. Celui-​ci n'a pas rem­pli son devoir lors du man­dat Macron 2017 à 2022, car il n'a pas osé contre­dire l'exécutif et n'a donc pas ser­vi comme garde fou. Ce qui est inutile est doré­na­vant nul et non ave­nu. Nous nous pas­se­rons donc de lui pour la pro­chaine élec­tion pré­si­den­tielle et nous ne lui accor­de­rons pas d'attention à ce qu'il pour­rait nous dire en 2027.